Le Pont des Arts et des Rencontres Culturelles Blanche Maynadier
Préface de Martial Maynadier
Directeur de la Collection le Parc
Sylvie Olivo est une voix singulière et mystérieuse.
De la Guyane, où elle vit, elle nous transmet ici un foisonnement de vie qui passe dans le murmure des mots, la liane vivace des textes. Des grands fleuves, elle garde la limpidité des eaux, l’opacité des rives. Tout n’est pas dit, tout n’est pas expliqué.
Certaines évocations nous interrogent, et nous laissent sans réponse, mais avec des rêveries qui valent davantage que des certitudes. Le vocabulaire présente des particularités au goût de sel, qui nous confrontent, au détour d’une page, à l’« inconsolation » aux « palpitements » du cœur, et surtout à ce terme divisé « l’in-tranquille » qui donne titre au recueil. Nous savons depuis Pessoa, que « l’intranquillité » est compagne du poète et qu’elle construit des livres. Ce titre au féminin, qui porte en lui-même un tiret de rupture autant que de liaison, ajoute à cette notion une dimension nouvelle.
L’auteure, aussi étranges qu’apparaissent parfois les poèmes est cependant, on le sent bien, toujours, dans une grande proximité du vécu. Rien ici que de personnel, de ressenti, d’authentique. La plupart des poèmes utilisent le « Je » de la confidence, et presque du journal intime. Un « tu » souvent nous interpelle, qui, même si nous comprenons bien qu’il s’adresse le plus souvent à quelqu’un qui n’est pas le lecteur, nous implique pourtant, établissant un lien, un dialogue constant entre celle qui écrit et celui ou celle qui la lit.
Nous percevons un rapport familial, personnel, qui s’exprime dans la plupart des textes. La mère, l’enfant, les proches sont au cœur de l’expression subjective qui parcourt le recueil, au point que nous sommes surpris d’apprendre à la fin du poème « Maria », qui est véritablement cette femme mystérieuse, malheureuse et gémissante dont on perçoit dans la voix souffrance et désarroi. De même le poème « 28 février » nous étonne par la proximité qu’il crée entre un événement apparemment extérieur et la vie personnelle.
De même, le dernier texte, dont on pourrait penser qu’il évoque des souvenirs précis d’un voyage effectué le long de l’amazone, se révèle le commentaire d’un tableau de Séraphine de Senlis, « l’Arbre de vie ».
L’ensemble des textes de Sylvie Olivo est sous ce double signe de l’étrangeté, et de la plus grande proximité, celle de la sève vitale, irrigant dans l’intranquillité, les courant parallèles du vivre, et du livre….
Une pluie nerveuse
Agace ses épaules,
Dans sa marche fiévreuse
C’est à peine si elle sent,
L’humidité du sol,
Les flaques inégales,
La route brumeuse,
Le matin naissant
Je viens, je viens
Ma rêveuse,
Ma rose des vents
Attends- moi !
Son pas, son coeur s’affolent,
En bonds impatients,
Dieu ! Revoir sa vestale
Retrouver sa fugueuse !
Le long du littoral
Le vent est vivifiant,
Ensorcelant l’aube pâle
En pétales qui la frôlent.
J’arrive, j’arrive
Ma gracieuse
Mon vif argent
Attends-moi !
Du soleil clinquant,
Les vagues en farandoles,
Leur ressac d’argent
Et dentelles soyeuses
C’est l’appel de l’océan,
Le concert, le récital
De la mère et l’enfant
L’océan de tes yeux
L’océan pour nous deux
Ma luciole,
Ma bestiole
Le cristal de ta voix,
Le velours de ton chant
À nous deux, seulement…..
Aquarelle
Une goutte d’eau
Sur l’aquarelle,
Un sanglot
Du ciel….
Tout change,
Entre vert et gris
Des rouleaux de pluie
Sur une mer morose
Une goutte d’eau
Sur l’aquarelle,
Une maladresse
Le genre qui blesse…
C’était pas exprès,
Mais le mal est fait…
C’est un ciel de guerre,
Dans l’azur initial
C’est un bras de fer
Pour un certain idéal… ;
Elle était pourtant belle
L’aquarelle,
Ses fragiles couleurs
Avaient l’air familier ;
De ces petites lumières
Dans une maison, l’hiver….. :
Les couleurs du bonheur
Inaccessibles au pinceau,
Imperfectible tableau,
Un rêve…. trop beau
Tu lui ressembles
Cette même lassitude
Contenue
Comme des sentiers
Tellement parcourus,
Piétinés, battus,
Griffés des ronces
De la solitude,
Jonchés de rêves perdus.
Tu lui ressembles
Le regard en suspens,
Plus loin que le désert
Où l’horizon tremble
D’un soleil acharné,
Blonds et ocres confondus
dans ta main étonnée.
Toujours l’espoir de partir
Et l’envie de rester
Tapis dans l’ombre.
Tu lui ressembles
La lumière de septembre,
Toute chaude encore
De l’été aux fils d’or
S’attarde sur tes bras
Entre ici et là-bas,
Est-ce vraiment toi,
Tu me fais signe de la main,
Aux lèvres, un sourire sibyllin,
Ce sourire, je le connais bien…
Plongée entre hier et demain
Photo noir et blanc à la main,
Je tente aussi de sourire
Derniers commentaires
10.05 | 13:25
Hello Didier,
Après Art-Cœur, un autre point de contact avec tes mondes poétiques, j'attends la prochaine rencontre avec impatience,
Christian
24.04 | 07:54
"La véritable musique est le silence et toutes les notes ne font qu'encadrer le silence" (Miles Davis)
08.11 | 18:36
Bonjour, j'ai cotoyé votre maman à Molay et je voudrais vous envoyer une photo que j'ai prise devant sa maison natale
07.08 | 16:21